top of page

14. Rio itaquai, zone interdite

  • Photo du rédacteur: Le voyageur de l'extrême !
    Le voyageur de l'extrême !
  • 3 mars
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 8 oct.



Le Rio Itaquai est un affluent interdit de l’Amazonie. Situé dans une région dense, reculée, à la frontière du Brésil avec le Pérou et la Colombie. Il traverse une zone extrêmement isolée, proche de territoires d’ethnies autochtones isolées, notamment les Indiens non contactés, comme les Korubo et les Flecheiros. C’est une zone interdite à la majorité des visiteurs, protégée par des lois brésiliennes pour éviter les contacts forcés ou destructeurs avec ces peuples. L'armée brésilienne patrouille le secteur afin d'intercepter toutes embarcations non indigène. Les ''Flecheiros'' l'une des tribus hostiles encore jamais entrées en contact avec les hommes civilisés y vit et est protégé de tout contact.

ree







On m’avaient dit de ne pas y aller. Les mots étaient simples, sans menace. "Pas là-bas. Pas sur l’Itaquai. Ce n’est pas pour vous." Mais c’est justement ce qui m’attirait. Pas le danger. Pas vraiment. Mais l’idée que là-bas, quelque chose existe encore que personne ne connaît. Un fleuve qui ne figure dans aucun guide. Une terre sans selfie. Des hommes sans nom.

ree







Après une première interception par la marine brésilienne, ils nous laisserons repartir avec nos papiers en règle. nous nous dirigerons vers un autre affluent plus petit et plus sinueux pour rejoindre le Rio Itaquai. Nous aboutirons beaucoup plus loin que la patrouille brésilienne cette fois et nous pourrons naviguer en toute tranquillité mais pas en sécurité.

ree







Le Rio Itaquai coule comme un murmure interdit, entre les arbres géants. On le rejoint après des heures de navigation sur l’Amazonas, puis sur le Javari. Les cartes deviennent floues. Les noms s’effacent. Seules les histoires restent. Celles des Korubo, "le peuple massue", qu’on ne voit jamais mais qu’on redoute toujours. Des silhouettes qui apparaissent et disparaissent. Des flèches venues des feuilles.

ree







On m’avait confié à un très bon guide, vieux métis au regard sale. Il avait accepté cet aventure et une promesse que je ne tiendrais pas." Tu regardes. Tu écris. Tu ne parles pas." La forêt a changé. Moins d’oiseaux. Moins de sons. Comme si elle retenait son souffle. Le guide a murmuré : "Zone interdite. Si on voit une pirogue sans moteur, on part."

ree







Nous avions quitté la pirogue pour longer un bras étroit du fleuve à pied. Un sentier de boue, de branches fouettantes, d’ombres mouvantes. J’ai senti quelque chose dans l’air. Un poids. Une frontière invisible. Le genre de frontière que les cartes ne montrent pas, mais que les corps comprennent. Le soir, sur la rive, nous avons vu des traces. Pas d’animal. Des pieds nus. Le guide les a effacés d’un revers de machette. Il a levé les yeux : "Ils nous regardent. Toi, t’es vivant parce qu’ils veulent bien."

ree







La nuit, j’ai rêvé d’yeux dans les feuilles. De visages peints. D’un monde qui me refusait. Je n’ai rien vu. Pas de contact. Pas de flèche. Mais quelque chose nous a vu. Au petit matin, au moment où l’on pensait que le fleuve nous avait rejetés que le silence s’est brisé. Nous somme reparti à pied pour essayer de faire contact. Le guide n’aimait pas ça. "On est trop loin." Sa voix était basse, presque un souffle. "Ça, c’est pas un endroit pour nous." Mais nous avons continué.

ree







Ce fut d’abord une odeur. Pas celle de la forêt. Quelque chose de plus fort, plus proche. De la fumée. Des cendres récentes. Puis un bruissement. Pas un animal. Un pas humain, derrière la densité. Le guide a levé la main. Figé. Oreilles grandes ouvertes. J’ai retenu ma respiration. Un sifflement. Trois notes. Douces, mais claires. Le guide a pâli. "Ils savent." Et puis ils sont apparus.

ree







Deux aborigènes. Peut-être quinze ans. Torse nu. Peau d’ambre sombre. Le visage peint. Dans ses mains, une lance courte ou un arc, chasseur cueilleur ? Pas levée. Ils nous regardait. Pas comme un animal effrayé. Pas comme des guerriers. Comme quelqu’un qui choisit. Je me souviens avoir pensé : c’est eux qui décide si ce moment existe ou non.

ree







Leurs regards étaient calme, mais profond. Insondable. Puis, sans un mot, ils ont tourné le dos et disparu, avalé par le vert. Le guide m’a saisi par le bras. "On part. Maintenant. Il nous a vus. Ils nous ont épargnés." Nous n’avons pas couru. Mais nous n’avons plus parlé. De retour au fleuve on a paqueté nos affaires et sommes reparti. C’était un message ou un avertissement. Peut-être les deux.

ree







Mais je sais une chose : le contact a eu lieu. Pas avec un peuple. Mais avec une frontière. Et elle m’a laissé repartir. Sur la pirogue, le fleuve paraissait plus sombre. Je regardais l’eau, et j’avais le cœur lourd d’avoir voulu franchir la ligne. Comme si j'avais regardé par le trou d’une serrure vers un monde qui ne m’appartient pas.

ree







Le Rio Itaquai est une zone interdite non pas à cause du danger, mais parce que certaines choses doivent rester hors d’atteinte. Parce que dans un monde qui dévoile tout, il reste encore des secrets qu’il vaut mieux ne pas déchirer.

ree






13... retour en arrière ou la suite dans ...15

 
 
 

Commentaires


bottom of page